VOL. 40 NO 4 8 VOL. 40 NO 4 9 Dans le marché compliqué auquel est confrontée l’Europe, le Cersaie – Salon international de la céramique pour l’architecture et de l’ameublement de salle de bain – a répondu aux attentes des entreprises qui ont investi dans ce Salon pour créer une vitrine internationale unique au monde et présenter à leurs clients leurs tout nouveaux produits. La 41e édition du Cersaie, qui s’est tenue à BolognaFiere du 23 au 27 septembre, occupait 15 pavillons, sur un total de 145 000 m², accueillant 606 entreprises exposantes dont 332 du secteur des carreaux céramiques, 91 du secteur de l’ameublements de salle de bain et 183 des secteurs pose, matières premières, nouvelles surfaces et services. La connotation internationale du Salon a été confirmée par les 230 exposants étrangers (38 % du total) et les 25 pays représentés. RESPECTER L’ENVIRONNEMENT ET DEMEURER COMPÉTITIF L’engagement envers les objectifs européens de développement durable est primordial. Cependant, il est essentiel de noter que la mise en œuvre pratique du système menace actuellement l’avenir et la survie de nombreuses entreprises de céramique en Europe. Pour l’industrie de la céramique italienne, qui a déjà réalisé des investissements substantiels pour améliorer l’efficacité des processus et minimiser les impacts environnementaux, il n’existe actuellement aucune solution technologique viable qui permettrait de nouvelles améliorations significatives. Le secteur a atteint un point où les technologies existantes ne peuvent plus entraîner de réductions supplémentaires des émissions à une échelle significative, et la transition vers un vecteur énergétique entièrement décarboné n’est ni réalisable ni prévisible dans un avenir proche pour ces entreprises. Malgré cela, l’industrie italienne reste engagée dans le développement continu de produits et la recherche technologique. Au cours de cette phase de recherche et d’expérimentation, il est essentiel de maintenir la neutralité vis-à-vis des alternatives potentielles afin de trouver les solutions les plus adaptées. IL Y A AUSSI LA CONCURRENCE INTERNATIONALE En plus des grands défis environnementaux, la forte concurrence internationale est un facteur critique pour l’industrie italienne de la céramique, qui exporte plus de 80 % de sa production dans le monde. Le coût élevé de l’énergie en Italie, de trois à quatre fois plus élevé que celui payé par des concurrents de plus en plus féroces d’autres continents, combiné au coût des émissions en constante augmentation (et exclusif à l’Europe), place les entreprises italiennes dans une situation de grave désavantage concurrentiel. Cela menace de forcer les entreprises à délocaliser leurs activités à l’étranger, mettant en péril la survie de nombreuses entreprises et de dizaines de milliers de travailleurs. L’industrie observe déjà des signes de ralentissement des investissements en raison de l’incertitude croissante quant à l’avenir. Dans le rapport intitulé L’avenir de la compétitivité européenne, présenté le 9 septembre à Bruxelles, Mario Draghi a étudié la trajectoire possible de la compétitivité économique de l’Europe et propose des stratégies pour renforcer la position de l’Union européenne au sein de l’économie mondiale. Le rapport souligne le rôle important de la politique commerciale pour aligner les objectifs de décarbonation de l’UE sur la nécessité de maintenir la compétitivité mondiale de l’industrie européenne. De ce point de vue, l’une des principales priorités consiste à uniformiser les règles du jeu dans les secteurs plus exposés à la concurrence déloyale de l’étranger et/ou confrontés à des objectifs de décarbonation plus exigeants que leurs concurrents internationaux — y compris l’application de droits de douane et d’autres mesures commerciales lorsque cela est justifié. En d’autres termes, Draghi recommande aux institutions européennes d’adopter des politiques ou d’appliquer des droits de douane pour garantir que les secteurs fortement exposés à la concurrence internationale (comme l’industrie italienne des carreaux de céramique, un secteur manufacturier italien de premier plan qui génère 83 % de ses revenus à l’exportation) soient en mesure de rivaliser à l’échelle mondiale sur un pied d’égalité. Il souligne que ces secteurs sont confrontés à une concurrence déloyale de la part de producteurs de pays qui non seulement ne respectent CERSAIE LES GRANDS DÉFIS DE LA CÉRAMIQUE ITALIENNE par Marcel Soucy pas les normes européennes en matière de durabilité environnementale et sociale, mais ont déjà été sanctionnés pour pratiques commerciales déloyales. En ce qui concerne le secteur des carreaux de céramique, le non-respect des règles du commerce international est un problème important non seulement avec la Chine mais aussi avec l’Inde, qui a développé une industrie des carreaux de céramique extrêmement énergique ces dernières années. C’est le pays qui a connu la plus forte croissance des exportations vers l’UE au cours des cinq dernières années (une augmentation de 235 % depuis 2018), une période au cours de laquelle la consommation européenne de carreaux de céramique n’a augmenté que de 2 %. En 2023, la Commission européenne a reconnu les pratiques commerciales déloyales de l’Inde en imposant des droits antidumping sur les importations indiennes de carreaux de céramique. Cependant, comme l’indiquent les chiffres ci-dessus, ces mesures n’ont rien fait pour freiner la pénétration agressive de l’Inde sur le marché européen. Après l’imposition de droits, les importations indiennes dans l’UE ont bondi d’environ 67 % (chiffre de 2023), alors même que le marché global s’est contracté d’environ 20 %. En réponse, les institutions européennes ont reconnu que ces mesures étaient inefficaces et ont exprimé leur volonté d’explorer d’autres solutions pour contrer les pratiques déloyales de l’Inde. Au cours de la dernière décennie, la capacité de production de carreaux de céramique de l’Inde est passée de 1,2 à 3,7 milliards de mètres carrés par an, ce qui a permis à l’Inde de gagner une part de marché importante non seulement dans l’UE, mais aussi aux États-Unis et dans le reste du monde. À la lumière de la publication prochaine aux États-Unis de droits antisubventions et antidumping provisoires sur les importations indiennes, qui devraient se situer entre 328 % et 489 %, l’industrie européenne des carreaux de céramique exhorte la nouvelle Commission européenne à mettre également en œuvre des mesures adéquates pour lutter contre la concurrence déloyale au niveau de l’UE.
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